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Et Genève inventa le luxe…

L’horlogerie genevoise jouit d’une image de raffinement et de tradition bien au-delà de ses frontières. Mais ce qui apparait aujourd’hui comme un positionnement naturel est en fait le fruit d’une histoire complexe. Car les institutions actuelles sur lesquelles reposent la légitimation du luxe – comme le Patek Philippe Museum (2001), le Grand Prix d’Horlogerie de Genève (2001) ou la Fondation de la Haute Horlogerie (2005) – sont en fait les héritières d’instances plus anciennes… et réactionnaires. Dès 1870 en effet, l’organisation horlogère genevoise passe de l’artisanat à l’industrie, provoquant chez une certaine élite une réaction de rejet. Pour tenter de préserver l’horlogerie de la modernité, celle-ci fonde successivement le Poinçon de Genève (1886) ou le Musée d’horlogerie de Genève (1888), tous deux imaginés comme remparts à la mécanisation. Or, l’horlogerie que ces deux institutions promouvaient n’était plus représentative de la production de l’époque. Tout comme le terme de «tradition» qui est aujourd’hui largement galvaudé. C’est l’un des aspects qu’a voulu montrer l’historien Pierre-Yves Donzé dans son dernier livre «L’invention du luxe, Histoire de l’industrie horlogère à Genève de 1815 à nos jours», paru aux éditions Alphil. (fe)

Photo: Malgré le prestige de l’horlogerie de Genève, son histoire
contemporaine n’avait jamais fait l’objet d’une étude
approfondie. Le livre de Pierre-Yves Donzé propose,
pour la première fois, une analyse historique.