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Le Système Périodique des éléments

Les savants de la Grèce antique eurent beaucoup de peine à définir et découvrir les éléments chimiques. Seul Démocrite d’Abdera (460-371 av. J.-C.) élabora un concept proche de la réalité. D’après lui l’univers consiste en espace vide et en atomes, particules minuscules et indivisibles se distinguant par leur forme et grandeur.

D’autres philosophes grecs misèrent sur l’eau, l’air et le feu en tant que principes élémentaires de la matière. Aristote (384-322 av. J.-C.) ajouta la terre à cette triade. Mais aucun des éléments de l’antiquité était un véritable élément chimique.

L’église chrétienne ayant intégré Aristote dans son système dogmatique, son influence devint si grande qu’un système de connaissances de la matière totalement inutilisable s’imposa durant le Moyen-âge, empêchant tout progrès. En parallèle, les alchimistes essayèrent de préciser le système aristotélien. Plus particulièrement, ils définirent le soufre et le mercure en tant que «père» et «mère» des métaux. Le sel lui était considéré comme «corps» des éléments. Tout cela était complètement faux, mais au moins le soufre et le mercure furent reconnus en tant qu’éléments chimiques.

Le Système Périodique

Au cours du XVIIIe et du XIXe siècle, plusieurs chimistes réalisèrent que certains éléments affichaient des propriétés analogues, par exemple les métaux alcalins sodium et potassium ainsi que les halogènes chlore, brome et iode. C’est sur cette base bien établie que le chimiste allemand  Julius Lothar Meyer (1830-1895) conçut un système des éléments en 1868, mais ne le publia que l’année suivante.

Meyer perdit ainsi la priorité de cette découverte fondamentale qui revint à Dmitri Iwanovitch Mendelejew (1834-1907). Il n’établit son système de périodes des éléments qu’en début 1869, mais le publia sans tarder. Nommé professeur de chimie à l’université de Saint-Pétersbourg, Mendelejew eut son idée de génie en préparant le cours pour ses étudiants. Il groupa les 63 éléments connus à l’époque dans l’ordre de leur poids atomique en lignes horizontales, les familles d’éléments aux propriétés semblables formant dans ces périodes des colonnes verticales.

L’atome tout de même fissile

Afin d’éviter des contradictions dans son système, Mendelejew fut obligé d’y laisser un certain nombre de cases vides. Il les attribua à des éléments encore inconnus et prédit leurs propriétés par interpolation. Ces éléments furent effectivement découverts par la suite: il s’agit de l’hafnium, du germanium et du gallium. Henri Becquerel (1852-1908) à Paris découvrit en 1896 la radioactivité de l’uranium. Il s’agissait de la décomposition spontanée par stages multiples de l’atome d’uranium instable à celui du plomb stable. Le concept de l’atome indivisible préconisé par Démocrite fut également érodé en 1897 par le physicien britannique J.J. Thomson (1856-1940) qui découvrit l’électron, composant de l’atome.

Le Néo-Zélandais Ernest Rutherford (1871-1937) fit une découverte encore plus spectaculaire. Avec un diamètre de quelques dix millionièmes de millimètre les atomes sont déjà très petits. Rutherford démontra que 99,9 pourcents de leur masse est concentrée dans un noyau encore dix mille à cent mille fois plus petit. Il consiste en deux sortes de particules: le proton positivement chargé et le neutron d’une masse presque identique mais électriquement neutre. Les électrons circulent autour du noyau, l’orbite la plus éloignée définissant le rayon de  l’atome.

Les périodes du système

Les noyaux des éléments légers et stables abritent à peu près le même nombre de protons et de neutrons. Les noyaux encore plus lourds ont besoin d’un nombre toujours plus grand de neutrons afin d’assurer leur stabilité vis-à-vis de la force répulsive des protons. Dans le cas de l’atome stable le plus lourd (le plomb Pb-208) le noyau consiste en 82 protons et 126 neutrons. Mendelejew établit sa classification des éléments sur la base de leurs propriétés et de leur masse.

La raison de l’organisation des atomes en 7 périodes et 18 groupes ne devint claire qu’avec l’avènement de la mécanique ondulatoire six décennies plus tard. C’est ainsi que l’on comprit enfin pourquoi les électrons circulant autour du noyau atomique forment des couches abritant au maximum 2, 8, 8, 18, 18, respectivement 32 et 32 électrons. L’arrangement des électrons extérieurs est en effet le même pour tous les atomes d’une colonne donnée du Système Périodique. L’importance des travaux de Mendelejew fut immédiatement reconnue. Il fut élu à 90 académies des sciences du monde entier et reçut la plupart des grands prix scientifiques – à part le Prix Nobel. En 1955 on lui accorda la suprême accolade (hélas posthume), l’élément No. 101 recevant son nom. Avec le Mendélévium (Symbole Md), le chimiste russe trouva sa place dans le système qu’il avait lui-même créé.

Des éléments „féminins“

Des scientifiques du sexe féminin jouèrent un rôle important dans l’élaboration finale du Système Périodique. Tout le monde connaît Maria Sklodowska-Curie (1867-1934, deux prix Nobel) pour le radium et le polonium. Par contre, Julia Lermontowa (1846-1929), première femme à obtenir un doctorat en chimie, n’est vraiment connue qu’en Russie. Elle réussit autour de 1900 à proprement séparer les éléments apparentés au platine (ruthénium, rhodium, palladium, osmium et iridium) et à déterminer leur poids atomique exact.

Le radon, gaz noble radioactif fut co-découvert en 1899 par la chimiste canadienne Harriet Brooks (1876-1933). Lise Meitner (1878-1968) prouva en 1917 à Berlin l’existence du protactinium. En 1925 Ida Tacke (1891-1975) travaillant avec son mari Walter Noddack, découvrit le rhénium, nouvel élément stable du système périodique. En 1939 Marguerite Perey (1909-1975) à Institut du Radium à Paris s’immortalisa avec le Francium, élément radioactif du groupe des métaux alcalins.

Photo: Version récente du Système Périodique avec les 118 éléments connus à ce jour. Tous les éléments suivant le Plomb (Pb) sont radioactifs et donc instables.